Bonjour, pouvez-vous nous parler de votre parcours chez Coca-Cola et de votre poste actuel ?
Bonjour oui, bien sûr. J’ai travaillé chez Coca-Cola de 1999 à 2004, où j’ai occupé trois postes différents. À Paris, j’étais chef des ventes, dirigeant une équipe de dix commerciaux visitant les grandes et moyennes surfaces. Ensuite, j’ai travaillé dans le secteur hors foyer, qui inclut les cafés, hôtels, restaurants, bars et parcs de loisirs. J’ai également été chef de vente dans ce domaine pendant un an. Grâce à mon expérience dans ces deux secteurs, j’ai été transféré au siège pour devenir négociateur avec une vingtaine de chaînes de restauration comme Buffalo Grill, Hippopotamus et les boulangeries Paul. Ce parcours m’a permis d’acquérir des compétences variées en négociation. Par la suite, un cabinet de recrutement m’a approché pour rejoindre Galbani. Ils avaient besoin de créer un département restauration, ce qui m’a offert une opportunité d’entrepreneuriat au sein d’une structure salariée et donc sans les risques associés. Après Galbani, j’ai occupé divers postes avant de devenir directeur commercial chez Vella, une marque professionnelle qui s’adresse principalement aux salons de coiffure. J’y supervise une équipe de 110 personnes et tout se passe très bien.
Pourquoi avoir voulu créer ce réseau ?
Coca-Cola est une entreprise extrêmement marquante. Travailler pour cette marque est une expérience exceptionnelle, non seulement en raison de la puissance de la marque elle-même, mais aussi grâce aux moyens extraordinaires dont elle dispose et aux événements prestigieux auxquels elle participe, comme la Coupe du monde ou les Jeux olympiques. Après avoir quitté Coca-Cola après 5 ans, ce qui me manquait le plus, c’était l’état d’esprit unique, l’ambiance et la richesse des personnes que j’avais rencontrées, ainsi que le niveau de professionnalisme élevé. En changeant d’entreprise, j’ai ressenti qu’il manquait cette dynamique unique que j’avais au sein de Coca-Cola. C’est ainsi que j’ai commencé à contacter d’anciens collègues. Ce qui a débuté par un premier dîner avec une dizaine de personnes s’est rapidement transformé en rencontres régulières. De 10 personnes, nous sommes passés à 15, puis à 20, et nous avons élargi le cercle à des gens de différents départements comme le marketing et la finance. Après quelques rencontres, nous avons envisagé de formaliser ces retrouvailles en créant un réseau d’anciens collaborateurs. Coca-Cola possédait un réseau d’anciens retraités, mais il n’y avait aucun réseau alumni ! Grâce à un petit budget de 5000 euros fourni par Coca-Cola et l’aide de quelques personnes, nous avons pu développer un site internet, nous permettant de centraliser les informations et de récupérer les adresses e-mail de ceux qui avaient quitté l’entreprise. En peu de temps, nous sommes passés de 10 à 80 membres. Nous avons alors dû organiser nos réunions dans des salles louées et avons commencé à demander une cotisation annuelle de 30 euros pour couvrir les frais. Le réseau a désormais pris une dimension plus professionnelle et structurée, avec un véritable bureau, des événements organisés, et un soutien mutuel pour les membres en recherche d’emploi. Ils organisent désormais des dîners et des conférences trimestrielles, parfois en collaboration avec les réseaux d’autres grandes entreprises comme Procter, Danone et L’Oréal. Je suis allé au dernier dîner organisé par le réseau, nous étions 150 à bord d’une péniche sur la Seine. Il y avait des salariés de Coca-Cola qui sont venus parler de l’expérience aux Jeux olympiques, c’était très intéressant d’avoir un aperçu des projets de l’entreprise. Je ressens une certaine fierté, bien que je reste modeste, d’avoir été à l’initiative de ce réseau, qui continue de prospérer et de servir la communauté des anciens de Coca-Cola.
Est-ce qu’il y a un profil type d’adhérent au sein du réseau Coca Cola club ?
Non, nous n’avons pas fixé de profil type. Il suffit d’avoir travaillé chez Coca-Cola, que ce soit en CDI ou en CDD, peu importe la période. Nous avons des membres qui ont quitté Coca-Cola dans les années 90 et qui ont rejoint le réseau. Les règles d’adhésion sont donc assez ouvertes et inclusives. Ce que je trouve remarquable au sujet du réseau, c’est l’entraide professionnelle qui dépasse la simple convivialité des rencontres. À la cinquantaine, période où l’on a souvent une bonne expérience mais où l’on devient plus coûteux pour les employeurs, cette entraide devient cruciale. Ceux qui ont quitté leur emploi, volontairement ou non, à partir de 50 ans, peuvent trouver un soutien précieux au sein du réseau. Le réseau offre non seulement des opportunités d’emploi, mais aussi un soutien psychologique important. Savoir que d’autres ont vécu des expériences similaires aide beaucoup à relativiser et à ne pas se sentir isolé. C’est un aspect essentiel de l’entraide que le réseau des anciens collaborateurs de Coca-Cola parvient à maintenir efficacement.
Quels défis avez-vous rencontrés au quotidien pour gérer ce réseau d’anciens collaborateurs ?
Le premier défi était de trouver du temps. Étant en poste, la gestion de l’association empiétait sur mon temps familial et personnel. Intégrer cette nouvelle activité dans un emploi du temps déjà chargé représentait un véritable challenge. Ensuite, il a fallu constituer une équipe de personnes prêtes à s’investir. Travailler ensemble n’était pas toujours simple car nous n’avions pas tous la même vision du réseau. Certains le voyaient comme un simple club d’entraide pour la recherche d’emploi, tandis que je l’imaginais comme un réseau offrant des opportunités d’apprentissage et de partage de connaissances. Harmoniser ces différentes visions demandait beaucoup de dialogue et de compromis. La gestion financière représentait un autre défi. Une fois l’association créée, il fallait gérer les fonds de manière équitable, sans que personne ne cherche à en tirer un profit personnel. Cela nécessitait une gestion rigoureuse et transparente. Le défi le plus significatif pour moi a été de décider de l’avenir de l’association. Fallait-il rester petit et limité ou croître en embauchant pour développer davantage le réseau ? Vu la taille et la notoriété de Coca-Cola, il était clair qu’il fallait viser grand. Cependant, cela demandait des compétences spécifiques et un investissement en temps que je ne pouvais plus fournir, étant incompatible avec ma vie personnelle. C’est pour cette raison que j’ai décidé de passer le relais après avoir été le premier président du bureau des anciens de Coca-Cola. Il était important de laisser la place à ceux qui avaient plus de temps et une vision pour développer davantage l’association. Je suis heureux de constater que le réseau continue de prospérer, ce qui démontre que cette décision était la bonne.
Comment gérez-vous les retours d’expérience et les suggestions de vos membres ?
En 2007, nous gérions principalement les retours d’expérience et les suggestions par mail. À cette époque, les technologies actuelles comme les chatbots n’existaient pas encore, ce qui limitait nos outils de communication. Le principal défi résidait dans la mise en œuvre des suggestions. Lorsqu’une recommandation était faite, il fallait identifier qui allait prendre en charge sa réalisation. Les membres avaient souvent de nombreuses idées, mais peu d’entre eux étaient disponibles pour les concrétiser. C’est pourquoi, aujourd’hui, le bureau du réseau Coca-Cola est composé d’une dizaine de personnes. Cette équipe répartit les tâches par département, ce qui permet de traiter les sujets de manière plus efficace et organisée.
Avez-vous observé des cas de « salariés boomerang » chez Coca-Cola ?
Oui, cela arrive. J’ai en tête au moins trois personnes qui ont quitté l’entreprise pour ensuite y revenir. Ces retours ne sont pas surprenants, ils dépendent surtout de la manière dont les employés quittent l’entreprise (offboarding). Chez Coca-Cola, comme dans beaucoup d’entreprises, il est courant de ressentir de l’insatisfaction ou de trouver que les choses ne progressent pas assez vite. Cependant, une fois partis, certains employés se rendent compte que l’herbe n’est pas forcément plus verte ailleurs. Les trois personnes que j’ai mentionnées ont trouvé leur place à des postes différents et sont toujours chez Coca-Cola, ce qui témoigne de l’attractivité persistante de l’entreprise.
Quels conseils donneriez-vous à une personne qui souhaiterait créer un réseau d’anciens collaborateurs dans son entreprise ?
Pour lancer un réseau d’anciens collaborateurs au sein d’une entreprise, plusieurs éléments sont à prendre en compte :
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- Contacter des présidents d’associations existantes : Plutôt que de partir à l’aveuglette, il est judicieux de se rapprocher de ceux qui ont déjà l’expérience de la gestion d’un réseau similaire. À l’époque, j’aurais trouvé très utile de discuter avec les présidents de réseaux d’anciens de grandes entreprises comme Procter, L’Oréal, ou Danone.
- Créer une équipe : Ne pas essayer de tout faire seul est crucial. Monter une équipe dès le début permet de répartir les tâches et de gagner en efficacité. Travailler en groupe aide aussi à aligner les visions et à mutualiser les compétences nécessaires.
- Trouver des financements : La gestion financière est un aspect incontournable. Penser à comment financer le réseau dès le départ est important. Cela peut inclure demander une cotisation aux membres, mais aussi chercher des sponsors ou des partenariats pour soutenir financièrement le réseau.
- Définir quelle est la valeur ajoutée : Réfléchir à ce qui différencie le réseau que l’on veut créer de ceux déjà existants. Pourquoi les membres potentiels devraient-ils s’y investir ? Quelles sont les valeurs, les bénéfices uniques et les objectifs du réseau ? Si c’est simplement pour se retrouver, organiser des dîners peut suffire. Cependant, si l’objectif est de maintenir l’esprit de l’entreprise et de continuer à bénéficier de son réseau professionnel, une approche plus structurée s’impose.
Ces conseils permettent de mettre en place un réseau solide, durable et véritablement bénéfique pour ses membres. Merci à Clément Politi pour cet échange ! Si vous souhaitez en savoir plus sur les réseaux alumni, nous vous invitons à lire cet article, où l’on a comparé les fonctionnalités des plateformes alumni à celle de LinkedIn.